En avant première, un extrait des 7 vies de Surcouf chez City éditions (ISBN : 978-2-824-61925-5) par Christine LACROIX qui sortira en septembre :
Comme je suis un être exigeant, les sorties entravées dans le jardin ne me suffisent pas. J’ai besoin de me dégourdir les coussinets sur une plus longue distance, et rien de mieux que la promenade dominicale, tôt le matin, avec l’homme qui partage ma vie, pour désankyloser mes pattes. Il n’y a pas de raison que seuls les chiens aient le droit de promener leur maître. C’est vrai que l’on ne voit pas souvent de chats déambuler dans les venelles avec la corde au cou, mais je ne suis pas une exception.
Le vantail côté rue à peine entrebâillé, je me faufile et je pars par la gauche au triple galop. Je fais toujours le tour dans le même sens. Puis je stoppe net à vingt mètres de distance, suffisamment loin de mon pas-de-porte pour être sûr de ne pas être obligé de rentrer. Alors commence la pêche aux messages olfactifs laissés par des pairs, des cabots ou des bisets. Un excrément canin là, une crotte de pigeon ici, un marquage à l’urine sur l’arête d’un mur, ça pourrait durer des heures… Si seulement on me laissait faire… Mais Pat s’impatiente quand je reste plus de trois minutes, le nez dans une matière fécale.
Je grimpe sur un rebord de fenêtre d’un rez-de-chaussée et je feule à l’encontre d’un rouquin qui me ressemble comme deux gouttes d’eau et qui me bigle à travers sa vitre. C’est mon deuxième voisin le plus proche, il s’appelle Chance et il en a eu, de la chance. Il s’est sauvé un jour alors que son garage était resté entrouvert et il a disparu pendant une année entière. Le quartier, moi et sa maîtresse en avions fait notre deuil. Et puis un matin, alors que je revenais de promenade, je refusai catégoriquement de rentrer et restai à émettre un grondement sourd devant le soupirail côté rue. Pat n’arriva pas à me persuader qu’il n’y avait pas âme qui vive dans ma cave. Il dut me porter pour remonter dans les étages. Il retourna seul explorer mon domaine en sous-sol, mais ne trouva rien. Je ne décolérais pas. Alors il me harnacha de nouveau pour une inspection du cellier. Je n’hésitai pas une seconde, je filai dans le box côté rue, me faufilai sous des palettes et me mis à gronder. Pat m’attacha à un tuyau en retrait et commença à bouger les plateaux en sapin. Une fusée roux et blanc lui fila entre les jambes et sortit par le soupirail. C’était Chance, amaigri, nerveux, fatigué, mais en vie. Enfin, moi, je n’avais pas de doutes, mais sa maîtresse en avait, surtout que son frangin, un chat tout blanc, ne semblait pas le reconnaître et encore moins accepter que cet inconnu squatte de nouveau son fauteuil préféré. Mais comme il était pucé, le doute ne fut plus permis à son retour du vétérinaire. Il paraît qu’avec son frère de sang, la complicité du temps jadis ne revint jamais. De ce jour, je le nargue en grimpant sur son appui de fenêtre chaque fois que je passe devant son home, car depuis lors, il n’a plus de permission de sortie.
En prévente sur les sites : https://www.cultura.com/les-sept-vies-de-surcouf-9782824619255.html
En attendant la sortie, si vous cherchez de la lecture féline, vous pouvez vous plonger dans un de mes 3 autres romans sur les chats :
Attila le curieux chat voyageur
Fantastiques-aventures-surcouf-