Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
28 novembre 2020 6 28 /11 /novembre /2020 09:24
Toussaint vous emmène en voyage !

 

Pendant ce second confinement, je vous ai invité à un voyage exotique et immobile sur l’île papillon, pour y découvrir les paysages, la faune et la flore de la Guadeloupe avec pour guide Toussaint Louverture, un chat créole. Un road movie antillais qui vous emporte loin de chez vous sans en sortir. Du 1er au 28 novembre 2020 vous avez pu lire quatre chapitres de mon 3ème roman félin « TROPIQUE DU CHAT » (ISBN: 979-10-348-1430-5 / Christine LACROIX) sorti chez Evidence éditions. Il est disponible en broché et en ebook, et est de nouveau à votre portée dans votre librairie préférée si vous avez envie de lire la suite.

Toussaint Louverture est un général de cavalerie né en 1743 à Saint-Domingue. En 1791 il posa la première pierre d'une nation noire indépendante en Haïti. Toussaint Louverture c’est aussi le héros de «Tropique du chat». Un «Cat-ribéen» qui raconte son île d’azur et de jade à travers ses yeux de félin. Blanchette est une petite chatte métropolitaine qui vit sa deuxième vie en gris, et rêve de lapis-lazuli et d’émeraudes. Sept mille kilomètres d’océan les séparent. Mais le destin se moque des distances…

1er chapitre :

http://chat-pitre.over-blog.com/2020/11/lecture-de-confinement.html

2ème chapitre :

http://chat-pitre.over-blog.com/2020/11/tropique-du-chat.html

3ème chapitre :

http://chat-pitre.over-blog.com/2020/11/lecture-de-confinement-3.html

4ème chapitre :

 

Toussaint

J’ai oublié de me présenter. Je suis un catribéen, né de mère européenne et de père inconnu, à Terre-de-Haut aux Saintes. Une île de la mer des Caraïbes située juste en face du grand continent vert, dans la ligne de Vieux-Fort et de Trois-Rivières. Mon ancêtre était égyptien, il était venu par bateau d’Afrique il y a fort longtemps avec une cargaison de bois d’ébène. La marchandise était bien noir ébène, mais le bois était bien vivant, enfin presque, d’après la légende. Je n’ai jamais quitté mon île, j’aurais pu visiter le Grand Îlet, l’Îlet à Cabrit ou Terre-de-Bas à seulement quelques encablures de mon port de naissance, il suffirait que j’embarque sur une vedette à touristes ou sur un bateau de pêche, mais je ne suis pas un aventurier, enfin, c’est ce que je pense à cette heure.

Je suis donc un chat noir antillais, la face et le ventre saupoudrés de sucre glace, avec des pattes blanches du carpe au coussinet et un cœur blanc sur la poitrine. J’ai le poil ras comme tous les habitants des pays tropicaux, pour pouvoir supporter les 28° quotidiens de notre île. Enfin presque tous, je connais une persane qui était en croisière sur un quatre-mâts baptisé d’une mer exotique et lointaine : La Méditerranée. Ce jour-là, elle s’était réfugiée dans une chaloupe pour échapper aux pieds qui la piétinaient, aux mains qui la souillaient, au brouhaha qui l’agressait. Seulement voilà, la chaloupe fut mise à la mer, d’autres mains et d’autres pieds se ruèrent à l’abordage. Elle se retrouva confinée dans un recoin. Elle prit ses pattes à son cou dès que la navette s’amarra à la terre ferme et elle resta cachée une journée, une nuit et une autre journée entière dans une barque de pêche, au risque, encore une fois, de jouer les chattes au long cours. Pas très futée, la belle étrangère.

Elle était couleur crème fleurette du menton aux coussinets,  la queue et les oreilles étaient caramel blond et ses yeux étaient des pépites d’or rouge. Elle ne resta pas blanche très longtemps d’ailleurs, car la vie de tapis persan n’est pas la vie des champs de cannes à sucre. Enfin, une chance pour elle, le rafiot où elle était cachée avait subi un cyclone et se trouvait dans le cimetière des bateaux en manque d’étoupe. Elle ne rejoua pas les filles de mer et finit par secouer ses vibrisses aux alizés.

Elle commença par pleurer ses maîtres disparus à jamais. Elle se retrouvait livrée à elle-même, abandonnée, orpheline tel Vendredi sur son île déserte, mais l’on était samedi et l’île grouillait de Z’oreilles, mais pas les siens. Ils étaient repartis par la dernière navette, la larme à l’œil, et s’étaient sûrement empressés de racheter à prix d’or un autre spécimen de chat persan en tout point identique ; il paraît qu’ils les fabriquent à la chaîne sur le continent. Il suffit de préciser le modèle, la couleur du pelage, de la queue et des yeux à la commande, comme pour une voiture. Cela a un prix, mais quand on aime les félins, et surtout le prestige des nobles races, on ne compte pas.

Elle avait faim. Dans son ancienne vie, il lui suffisait d’un petit miaulement pour être servie, mais maintenant cela ne fonctionnait plus. Elle but une lampée dans une flaque formée par la dernière averse tropicale du crépuscule et se mit en chasse. Elle avait repéré une grenouille brune qui chantait plus fort que les autres. Elle la goba, elle eut un spasme, elle la recracha aussi sec et bava de l’écume pendant dix minutes, pendant que la rainette reprenait ses vocalises là où elle les avait interrompues. Mauvaise pioche !

Des chauves-souris vibrionnaient autour d’un arbre à pain, gobant les lépidoptères impudents. Mais elles étaient bien trop hautes pour servir de repas. Heureusement pour la persane, car je ne pense pas que ce genre de vampire soit comestible. Elle reprit ses recherches parmi les ruelles désertées. Elle finit par dénicher un reste de colombo de cabri, surtout du riz et des épices, un peu raide à avaler pour un palais de métwopolitaine prénommée « Perle sacrée d’Ispahan ». Elle vomit dans le caniveau et souffrit de brûlures d’estomac pendant vingt-quatre heures. Elle trouva enfin un morceau de patate douce au fond d’une poubelle et s’en délecta comme si c’était une queue de langouste à la parisienne. Deux jours plus tard, elle se rapprocha d’une marchande d’acras « spécial » touristes, confectionnés à base de beaucoup de piment et de très peu de morue, et s’acclimata peu à peu à cette nourriture ensoleillée, car quand la faim…

Je suis donc un catribéen à poil ras ; un mâle entier noir et blanc. La tache immaculée entre mes deux yeux se termine en pointe, comme le plumeau sur le bicorne du général en chef des armées françaises de Saint-Domingue et je porte d’élégantes chaussettes blanches comme ses pantalons. J’ai vu le jour une nuit de carême, le vingt-cinq février en pleine saison sèche, dans un buisson de chèvrefeuille du Cap, parfumé au jasmin. Je gagnai mon indépendance cinq mois plus tard et je pris mes quartiers d’été permanent dans le bistrot du coin, entouré de vieux habitués à chapeau en feuilles de palmes. Au début, le bruit sec des dominos claquant sur la table dévernie et les invectives des matelots assoiffés me faisaient peur, aujourd’hui, je ne les entends plus. C’est le rendez-vous des marins, la halte rhum-citron vert pour les travailleurs de la mer, l’étape obligatoire avant le retour à la case et les remontrances de la matrone. Car si le patron pêcheur est seul maître à bord après Dieu, chez lui, c’est une tout autre histoire.

Si les chats de métropole sont dûment baptisés, les catribéens, eux, ne s’appellent pas ; libres comme la brise, ils passent d’un maître à un autre, font du saute-île, baguenaudent dans les ports, sans entrave, et ne se sédentarisent jamais assez longtemps pour pouvoir porter un nom. Je fais exception à la règle. Le patron du bistrot, où je traîne souvent mes coussinets, m’a trouvé un patronyme à mon image : celui d’un Antillais comme moi, mais du côté d’Haïti, général de cavalerie de son état, né le vingt mai 1743 à Saint-Domingue. En son temps, il posa la première pierre d’une nation noire indépendante lors de la révolte du vingt-trois août 1791 ; moi je n’étais pas encore né. Les Saintois et les communautés antillaises en général lui doivent de vivre sur un îlot de liberté.

Un tableau le représente sabre au clair, sur son destrier cabré, blanc comme l’écume, prêt à en découdre avec l’ennemi. La reproduction, jaunie par le soleil généreux des îles et les embruns tout aussi prodigues, est accrochée au mur du fond, juste au-dessus d’une chaise qui aurait bien besoin de voir un canneur. Le cannage défoncé pouvant tout juste supporter le poids d’un enfant d’un an ou celui d’un chat de onze mois. Je m’installe souvent, pour ma sieste du début ou de fin d’après-midi, sur cette chaise mise au rebut dans une encoignure de la salle pour éviter une chute malencontreuse d’un client sur le béton brut ; dans les îles, on ne jette rien, on garde au cas où. À force de me voir tous les après-midi sous cette gravure, le patron un jour eut l’idée de me donner son nom. Voilà pourquoi je suis connu comme Toussaint Louverture, le chat noir et blanc qui traîne ses pattes du côté du port.

Cette nuit, la lune argentée brille comme un joyau sur la voûte étoilée. J’arpente la jetée humide de la dernière averse. Le dicton bien connu « après la pluie le beau temps » a dû être inventé par un îlien, car, la dernière goutte à peine tombée du ciel, celui-ci se nettoie comme par magie et se pare de lumignons clignotants. Une ombre diaphane se glisse sous une coque renversée, la curiosité l’emporte sur la frayeur, je rampe sous le pointu et me retrouve vibrisses contre vibrisses avec la belle persane. Elle me conte ses aventures et je lui fais voir du pays. À nous deux, nous repeuplons Terre-de-Haut au fil de nos rencontres.

 

Partager cet article
Repost0

commentaires

R
Merci, au plaisir de vous voir sur mon blog de relaxation. https://relaxation-musique-antistress.over-blog.com/
Répondre
B
Merci pour ce beau voyage.<br /> Bises ronronnantes Christine et bon WE
Répondre

Présentation

  • : Le blog de CHAT PITRE
  • : AUTEURE DE ROMANS FELINS EDITEE AUX EDITIONS DE L'OPPORTUN ET CITY EDITIONS
  • Contact

  • CHAT PITRE
  • Passionnée de chats, je les photographie et je les romance.
  • Passionnée de chats, je les photographie et je les romance.

LIENS VERS MES ROMANS FELINS

 

Des chats pas comme les autres Aux éditions de l'Opportun

 https://www.amazon.fr/chats-pas-comme-autres-extraordinaires/dp/2380157871/ref=sr_1_1?__mk_fr_FR=%C3%85M%C3%85%C5%BD%C3%95%C3%91&crid=39JKE41TCCXLM&keywords=des+chats+pas+comme+les+autres&qid=1689497897&s=books&sprefix=des+chats+pas+comme+les+autres%2Cstripbooks%2C79&sr=1-1

 

 

Mon 2ème roman : ATTILA, le curieux chat voyageur chez City éditions

nouvelle version avec une préface de Brigitte Bulard-Cordeau

 

Les fantastiques aventures de Surcouf chez City éditions

 

 

 

 

 

LES FANTASTIQUES AVENTURES DE SURCOUF

"LES FANTASTIQUES AVENTURES DE SURCOUF"
mon 1er roman félin

LIEN VERS LE LIVRE : http://livre.fnac.com/a7889954/Christine-Lacroix-Les-fantastiques-aventures-de-Surcouf-le-Chat

Mon mail : surcouf.galaup@gmail.com

 

 

Catégories